NON, L'ÉMIGRATION HAÏTIENNE D'AUJOURD’HUI N’EST PAS UNE FATALITÉ
Non, l’émigration haïtienne
d’aujourd’hui n’est pas une fatalité
Par Richemond
Dacilien et Marc Donald Jean Baptiste
Depuis la proclamation de l’indépendance d'Haïti en 1804,
la vie dans la première république noire indépendante du monde est ponctuée par
la violence politique, les crises économiques et les catastrophes naturelles.
Ce qui représente un des déterminants alimentant
une très forte émigration de la population haïtienne vers des pays
étrangers. Comme résultat de cette
émigration, selon Cruce (2012), actuellement la diaspora haïtienne s’estime «
entre (2) deux à (3) trois millions d’haïtiens
vivant à l’étranger, sur une population estimée entre 8 et 10
millions ».
Avant les années 1960, notamment pendant la période de
l’occupation américaine entre 1915 à 1934, les paysans haïtiens, à la recherche
du mieux-être, partaient en masse travailler comme coupeurs de canne à Cuba et
en République Dominicaine. A partir des années 1960, 1970 et 1980 sous le règne
de la dictature des Duvalier, CRUCE (2012) relate que les Haïtiens de toutes
les classes sociales, ont commencé à quitter le pays pour fuir la terreur
imposée par le régime et tenter d’améliorer leurs conditions économiques. Leurs
destinations étaient à cette époque, les Etats-Unis, le Canada, la France, etc.
A la fin du XIX ème, deux évènements majeurs vont marquer
l’histoire de ce pays : la fin du règne de la dynastie des Duvalier, qui a
duré 29 ans (19957-1986) et, l’adoption de la constitution de 1987, votée par 87 % de la population. Ces évènements
marquent le début de l’ère « démocratique » en Haïti avec la garantie
des droits fondamentaux prévus dans cette constitution. Malgré tout, Haïti continue d’évoluer dans une
situation de crise permanente liée à l’instabilité politique, sociale et
économique, encore plus à des problèmes environnementaux. Durant cette période dite « démocratique » de 1986 à
nos jours, le pays a toujours été frappé par des catastrophes naturelles dévastatrices
(cyclones, ouragan, tremblement de terre,
épidémies…) certaines ont causé d’énormes dégâts, ont ravagé les terres
cultivables et détruire l’économie du pays. On peut citer par exemple, le
cyclone Sandy en 2012 qui a détruit 70% des récoltes, celui de Matthew en 2017 détruisant presque toutes les infrastructures du grand
Sud du pays. La partie de la population la plus touchée de ces catastrophes
naturelles sont les paysans qui vivent de l’agriculture dans les milieux
ruraux. Ils voient leur économie abattue, pour survivre, ils se déplacent pour
venir dans les villes à la recherche de l’emploi, d’où l’une des explications
au déplacement massif des ruraux haïtiens vers le monde urbain. Autrement dit,
ce phénomène explique un déplacement de la misère, du chômage, de la faim du
monde rural au monde urbain. Selon le dernier rapport de l’UNICEF sorti en 2012, la population urbaine d’Haïti a
augmenté de plus de 51% de la population totale, comparativement dans les
années antérieures où la population rurale haïtienne était toujours supérieure.
Une fois arrivée dans les grandes villes du pays, la population
(majoritairement jeunes des deux sexes), ne pense qu’à planifier pour quitter
le pays. Puisque leur rêve de voir leur vie améliorée dans les villes reste au
stade d’utopie. Tout désir de voir une vie meilleure est ailleurs dans
l’imaginaire collectif de l’haïtien d’aujourd’hui, puisqu’en en Haïti, on évolue
dans une insécurité totale (économique, publique, politique, environnementale)
continuelle. Sur cette même ligne, le professeur Fritz Dorvilier (2017) a même relaté dans son dernier article, qu’Haïti est un pays d’émigration constante et
croissante où presque tous les haïtiens veulent y quitter un jour.
En effet, ces haïtiens qui se dirigeaient vers la république
dominicaine, vers les USA, le Canada et autres, à la recherche du mieux-être,
sont des victimes des relations sociales économiques inégales présentes dans la
société depuis 1804. Aujourd’hui, ceux qui dirigent encore vers l’Amérique du Sud,
notamment au Brésil et le Chili sont encore des victimes de ce même système. Ce
n’est pas une fatalité migratoire. C’est le résultat de plus de 200 ans
d’établissement d’un système fort au profit d’une élite noire ou mulâtre contre
la majorité de la population. Alors, quand est-ce que cette majorité
silencieuse de la population dira-t-elle non à cette situation inacceptable
qu’elle endure depuis plus de deux siècles ?
Richemond
Dacilien
Marc Donald
Jean Baptiste
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