Jovenel Moïse le tombeau sacré des élus (2e Partie)!
Jovenel Moïse le
tombeau sacré des élus (2e Partie)
Par : Méleck Jean Baptiste,
Au nom de Jovenel, on accroche la
signature de Moïse comme on accroche Thomas à celui d’Haïti. Après avoir
traversé la mer rouge de nos
turbulences électorales, Moïse sera-t-il capable de façonner le serpent
d’airain pour la guérison du peuple haïtien après l’annonce de toutes ses
années d’errances dans le but de donner une directive définitive au pays?
Dans Haïti Thomas ou l’autre face du Bondye bon, l’ethno-linguiste haïtien
André Vilaire Chéry aborde l’énigme haïtienne dans une perspective
sociolinguistique. On ose croire, on lance un défi politique personnel sans
commune mesure. Par manque d’alternatives politiques, Jovenel Moïse est la
figure de proue de la débrouillardise à l’haïtienne, le visage prophétique
incarnant mieux le doux espoir des temps à venir. Dans les Lamentations de
Jérémie (chapitre 3 verset 22 à 24), l’espérance est présentée en ces
mots : « Les bontés de l’Eternel ne sont pas épuisées, Ses
compassions ne sont pas à leur terme ; Elles se renouvellent chaque matin.
Oh, que ta fidélité est grande ! L’Eternel est mon partage, dit mon
âme ; c’est pourquoi je veux espérer en lui ». Dans ses pérégrinations
de plus de deux siècles d’histoire, le peuple haïtien attend incessamment en
silence au front mécréant du nouveau-monde le grand moment de la relève
nationale. Sachant bien que nous sommes aujourd’hui à la fin de l’histoire du
monde : Heureux celui qui lit et ceux qui entendent les paroles de la
prophétie, et qui gardent les choses qui y sont écrites ! Car le temps est
proche (Apocalypse 1 verset 3). Dans les derniers jours, la notion de
participation citoyenne est éclipsée au profit des valeurs universelles d’humanité,
de responsabilité divine et d’auto satisfaction numérique. Tout devient
marchandise : le sport, la langue, le citoyen, l’homme politique, la
nature, le paysan, etc.
Le fardeau du
paysan
De l’expression « Nèg bannann nan » au locataire du
palais national, le contenu de la responsabilité s’est changé tout en
conservant sa charge sémantique et symbolique. Dans le débordement
communicationnel de la campagne électorale, c’est l’alter ego « Nèg bannann nan » qui est devenu
président. Nèg bannann nan, c’est le paysan, le « moun andeyò », l’
« agrikòl », l’exclu, l’homme humilié et banni de la société, le
marginal, le rural. Mais, sa victoire
dans ce monde odieux d’humiliation et de corvée peut-être assurée par la
croyance si payante en un lendemain meilleur. De l’appel socio-cosmique, le
paysan est un élu ayant pour mission d’indiquer la voie à suivre (Nèg bannann nan se chimen lavi miyò). La
sociologie politique de l’espace rural haïtien nous montre comment le lieu
politique de naissance ou l’origine sociale peut être utilisé à des fins
politiques. Jovenel Moïse, né d’origine très modeste le 26 juin 1968 dans la
commune de Trou Du Nord est la concrétisation de la prière paysanne, la détente
magique de l’homme noir en proie à la misère. Cette façon alchimique de
combiner les hommes à la terre, aux rivières (l’eau), au soleil tient lieu de
domination des autres phénomènes politiques surnaturels.
Le fardeau de l’homme blanc tient au
fait qu’il a construit tout son capital économique, culturel et symbolique dans
la colonisation, l’esclavagisme, l’exploitation féroce de l’autre, la
chosification des rapports sociaux, la prétendue supériorité raciale, la
fermeture de sa conscience au bien suprême. Le fardeau du paysan tient au fait
de sa croyance en la fatalité du destin, du mépris de la science comme schème
arrogant du Capital, de l’acceptation de l’oppression. Mais, le plus grand
fardeau du paysan tient au fait que tout le monde veut échapper à ce statut
contrairement au statut du blanc symbole d’une double aliénation.
Le nègre crucifié
ou le damné rose du puzzle infernal
Dans la configuration de son mandat
politique qu’il ne faut pas confondre avec son mandat historique, il a les
mains liées de mener en bon danseur de tango une coalition d’acteurs hétéroclites
dont l’ambition politique dépasse la part imaginable des choses réelles. Il est
passé d’acculé à accusé et d’accusé à acculé.
Monument élevé pour consoler nos
aïeux, Jovenel Moise est sacralisé par les élus locaux dans la hiérarchie
inconsciente du pouvoir politique psychologiquement métamorphosé. Dans son for
intérieur, il attendait venir le moment d’être consacré président et ne
confiait cela à personne sauf à son moi dichotomiquement chaleureux et patient.
Entrepreneur inachevé, politicien en sourdine catapulté dans les méandres de la
vie politique pour battre en brèche l’ozone des aveux, il est cependant
socialement enraciné à ses origines malgré toutes les réclamations jouissives
des caméléons de la classe possédante. L’actuel président est une pierre
tombale en chute libre écorchant les élites traditionnelles en pertes de
repères. Etant un acteur gardé sur les bancs de touche misant sur l’espoir, il
regarde l’histoire comme forme eschatologique individuelle. Jovenel Moïse est
l’homme d’un secret et des secrets qu’il peut encore garder au-delà du temps
quelque soient les circonstances et échéances. Son mandat présidentiel sera
tourné en l’espace d’un cillement. Comme un Dieu, il retournerait comme il
était venu. Pour l’homme de Trou Du Nord, l’avenir se résume à la hauteur des
espérances muettes car il faut attendre en silence le secours de l’Eternel.
Jovenel Moïse est plus apaisant, consolant que réaliste au goût des résultats
matérialistes. Promoteur volontaire de changement, il aime tout le monde sans
pouvoir répondre dignement au mal social. Revanchard, il n’aime pas son
prédécesseur immédiat donneur de leçons dont la condescendance bouillonnante
asphyxiait son leadership latent.
Méleck Jean
Baptiste, Politologue
Communicateur
social
E-mail :
mjbht2015@gmail.com
Références
Erving Goffman, La présentation de soi, la mise en
scène de la vie quotidienne.
Stanislas Leszczynski, Œuvres du Philosophe
bienfaisant, 1764.
Andre Vilaire Chery, Haiti Thomas ou l’autre face du
Bondye bon et autres textes, 2007.
Laënnec HURBON, Démocratisation, identité culturelle
et identité nationale en Haïti, 1998.
La Sainte Bible
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